"Je regarde donc
dans l’Eglise deux sortes de persécutions, la première en son commencement et
sous l’empire romain ou la violence devait prévaloir, la seconde à la fin des
siècles ou sera le règne de la séduction" (Boussuet).
"On veut toujours
combattre le mal à la place ou il se trouve, on ne s’inquiète nullement du
point où il prend son origine et d’où il exerce son action" (Goethe).
L’action
du mal, telle qu’elle se déploie aujourd’hui trouve sa source, ses racines
profondes et son inspiration, dans le Mal.
J’insiste
avec cette idée qui n’est guère plus beaucoup prêchée en chaire car à vrai dire
il n’y a plus de chaires, ni de prêches d’ailleurs, -les quelques babillages et
lieux communs vernis par une couche de psychologie de quartier ne pouvant recevoir
ce nom-, que le Diable a infesté notre monde et le domine.
Il
exerce par les trois concupiscences de la chair, des yeux et de l’orgueil des
richesses, son action.
Il
est le maître à qui beaucoup servent sans le savoir et, même, sans le connaître.
Le
monde est infesté et les esprits des ténèbres l’assaillent à la vitesse d’un
faucon qui plonge sur sa proie.
Ce
qui me permet d’affirmer cela n’est pas la présence du pèche qui existe dans nos
âmes et dans le monde, conséquence de la chute première, sinon l’omniprésence
du mensonge dans un monde qui ne va pas comme il faut.
Le
mensonge, et non pas le péché, est l’apanage ultime du Démon.
Le
Diable est le Prince du monde et, en même temps, le Prince du mensonge. Car s’il
s’oppose à Dieu ce n’est pas tellement pour répandre le mal mais plutôt pour
prendre sa place. Devenir à la place de Celui qui est. Dieu étant la Vérité suprême,
la qualité suprême du Diable reste le mensonge. C’est tout ce qui lui reste, c’est
tout ce qu’il a su emporter avec lui dans sa chute infernale précipité sur le
monde par le cri de Michel : Quis ut
Deus !
Le
démon est le grand Séducteur. Il souhaite que tous deviennent comme Dieu.
Tous
des dieux.
C’est
exactement ce que propose notre temps à l’homme moderne. Vit, jouis, selon tes
désirs et tes pulsions. Choisis ce que tu veux et ce que tu ne veux pas. La
mort et aussi la vie. Le plaisir sans l’enfantement et l’enfantement sans la
filiation. L’acte sexuel découpé de toute force créatrice ; une sorte de
parodie des corps qui s’enlacent mais ne se rejoignent plus tellement chacun
est plongé dans ses propres envies et ses plaisirs égoïstes. Coupe, écartèle,
tranche, quitte la vie à ce bébé, à ce vieillard, à ce miséreux qui ne peut
même plus marcher et dont le coût financier reposera sur les épaules des hommes
forts. Trucidez donc l’enfant dans le ventre de la mère, sans importer si cela trucide
aussi l’âme de celle-ci. Tuez le vieux qui ne sert à rien puisqu’il ne rapporte
même plus son pain.
Mais
pourtant l’homme ne vit pas seulement de pain. Tuez donc les mots, tuez le sens
de la parole. Tuez le logos pour qu’en coupant l’homme de tout raisonnement, il
s’enferme dans des pulsions animales et soit la proie de la danse orchestrée
par la symphonie démoniaque mise en place sous nos yeux.
Nous
sommes infestés. Nous sommes peut-être même possédés par le Séducteur qui rode
comme un lion en cherchant à qui dévorer. Notre monde est devenu le sien. Il
siège et règne dans tous les pays et impose sa volonté qui n’est autre chose
que le détournement de l’âme de l’homme du bien, du vrai et du beau.
Ainsi,
notre monde s’enlaidit et s’enfonce dans des drames épouvantables où la charité
n’a plus le droit de cité, et où le mensonge, l’adulation et la séduction
restent maitres de toutes les consciences.
Il
y a, ou il y avait, un rempart. Une digue qui freinait la déferlante du Mal. Un
pouvoir spirituel plus fort que celui du Diable. Une bénédiction fondée sur une
pierre. Une pierre fondatrice. Une pierre sur laquelle était bâtie l’Eglise. Une
pierre a qui a été confié le « Non praevalebunt
».
Le
rempart cependant s’effrite. Il semble faire eaux de toutes parts et il est
pris au terrible piège de la séduction. Il parle d’égal à égal avec le monde et
le monde et son maître le lui rendent bien.
L’esprit,
et plus encore, de Satan s’est infiltré au Vatican et une fumée, non bianca, s’échappe par toutes les fenêtres.
Est-ce
cela mon Dieu l’abomination de la désolation que Vous nous avez annoncé ?
Serons-nous mon Dieu, les derniers chrétiens à croire et espérer en Vos
paroles de Vie éternelle et non pas dans les solutions mondaines ?
Sommes-nous
Seigneur assez dignes d’être encore des soldats du Christ pour livrer, sous
votre étendard, l’ultime bataille ?
Je
ne sais Seigneur, mais mon âme est triste jusqu’à la mort de voir le champ de
ruines tout autour de moi.
Alors
Seigneur donnez-nous la force, de croire encore malgré la Séduction. De ne pas sombrer
dans les embuches du Démon. Donnez-nous la force de dire la Vérité. Haut et
fort. Sans compromission, sans soucis du quand dira-t’on.
Donnez-nous
Seigneur la grâce d’espérer encore, comme Marie au pied de la Croix.
Donnez-nous Seigneur la joie d’un Saint Thomas More en montant à l’échafaud et
donnez-nous surtout Seigneur la confiance d’une Jeanne d’Arc pour délivrer
notre monde du mal.